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JointHealth™ express   8 juin 2021



Principaux résultats de recherche présentés lors de l’EULAR 2021

L’Assemblée scientifique annuelle de l’EULAR s’est tenue pour la deuxième année consécutive de manière virtuelle. Des présentations en ligne ont permis de faire le point sur les dernières recherches, ainsi que sur les mises à jour cliniques concernant la pratique de la rhumatologie dans le monde. L’assemblée a offert une combinaison de présentations et de discussions enregistrées et en direct. Le programme de cette année comprenait plus de 170 sessions réparties dans 123 salles virtuelles différentes pendant quatre jours. Voici quelques-unes des principales présentations l’assemblée de cette année.

Les patients âgés ne présentent pas un risque accru d’infections graves avec les médicaments biologiques ou les médicaments à petite molécule cible par rapport aux ARMMts.

Les personnes âgées atteintes de polyarthrite rhumatoïde (PR) présentent généralement un risque accru d’infections graves. Des chercheurs allemands ont présenté les résultats* d’une étude évaluant les effets de classes de médicaments plus récentes, telles que les médicaments biologiques antirhumatismaux modificateurs de la maladie (ARMMb ou biologiques) et les inhibiteurs de Janus kinases (JAK), sur le risque d’infections graves chez les personnes âgées atteintes de PR (plus de 70 ans).

Les résultats de cette étude suggèrent que le traitement par des médicaments biologiques ou des inhibiteurs de JAK n’est pas associé à un risque accru d’infections graves chez les patients âgés par rapport aux ARMMts.** Les chercheurs ont trouvé des associations avec un risque accru d’infections graves pour l’utilisation de glucocorticoïdes, une activité plus élevée de la maladie et la présence d’une autre maladie sous-jacente comme une maladie pulmonaire ou rénale chronique ou le diabète. Les auteurs ont également constaté que le fait d’être en meilleure forme physique était associé à une diminution du risque de contracter une infection grave.

*Strangfeld A, et al. Elderly patients are not at increased risk of serious infections when receiving bDMARDs or JAK inhibitors compared to csDMARD treatment. Présenté à l’EULAR 2021; résumé OP0116.

**Conventional synthetic DMARDs include traditional medications such as methotrexate, sulfasalazine, leflunomide, hydroxychloroquine, gold, salts and others.

Inflammation de l’œil après l’arrêt de la médication chez les enfants atteints d’AJI.

L’uvéite est une inflammation de l’œil et une manifestation extra-articulaire courante associée à l’arthrite juvénile idiopathique (AJI). Elle peut entraîner des complications menaçant la vision et peut même conduire à la cécité si elle n’est pas contrôlée.

Des chercheurs allemands ont présenté une étude* lors de l’assemblée annuelle de l’EULAR en 2021 qui a analysé le risque d’uvéite après l’arrêt des médicaments antirhumatismaux modificateurs de la maladie (ARMM) chez les enfants atteints d’AJI.

Il s’agit de la première étude prospective** à examiner le risque d’uvéite après l’arrêt des ARMM. Les résultats démontrent que les rechutes d’uvéite sont fréquentes. Les patients qui arrêtent un traitement par ARMM présentent un risque élevé d’uvéite dans les 3 à 24 mois qui suivent l’arrêt. Les chercheurs ont recommandé que les rhumatologues et les ophtalmologues soient sensibilisés à ce risque, ce qui devrait mener à un dépistage régulier de l’uvéite après l’arrêt des ARMM.

*Klotsche J, et al. Risk for uveitis events after withdrawal of disease modifying antirheumatic drugs in the treatment of patients with extended oligoarthritis or rheumatoid factor negative polyarthritis. Présenté à L’EULAR 2021; résumé OP0165.

**A prospective study watches for outcomes, such as the development of a disease, during the study period and relates this to other factors such as suspected risk.

Tabagisme passif et pollution atmosphérique - Les liens avec le développement de l’arthrite et la mauvaise réponse au traitement

Il existe de plus en plus de preuves que la pollution atmosphérique environnementale est associée au développement de l’arthrite inflammatoire. Lors de l’assemblée annuelle de l’EULAR en 2021, une vaste étude de population menée auprès de femmes françaises rapporte que l’exposition passive au tabagisme pendant l’enfance ou à l’âge adulte augmente le risque de développer une polyarthrite rhumatoïde (PR). Une deuxième étude menée en Italie a révélé que la pollution atmosphérique a également un impact - les niveaux de pollution atmosphérique montrant une association avec l’échec du recours à un médicament biologique.

Dans l’étude portant sur la relation entre le tabagisme passif et le risque de développer la PR, le tabagisme passif pendant l’enfance était positivement associé au risque de PR dans l’ensemble de la population.* Les chercheurs ont ensuite analysé le statut tabagique de chaque personne et constaté que le tabagisme passif pendant l’enfance était associé à la PR chez les femmes qui n’avaient jamais fumé elles-mêmes, mais non chez celles qui avaient déjà fumé.

Lorsque les auteurs se sont intéressés au tabagisme passif à l’âge adulte, ils ont également constaté une association de risque positive dans l’ensemble de la population, mais lorsqu’ils ont analysé à nouveau le statut tabagique individuel, l’association avec un risque accru de PR ne concernait que les femmes n’ayant jamais fumé, et non celles qui avaient elles-mêmes été fumeuses.

Ces résultats suggèrent que les sous-produits du tabac - qu’ils soient inhalés activement ou passivement - pourraient générer une auto-immunité, au moins envers les antigènes** impliqués dans le développement de la PR d’une personne.

Dans une autre présentation, les chercheurs ont examiné un autre lien entre les poumons et l’arthrite inflammatoire. Ils ont examiné l’association entre la concentration de polluants atmosphériques et la réponse à un traitement médicamenteux biologique chez des personnes atteintes d’arthrite inflammatoire chronique vivant dans la région de Vérone en Italie.***

Les concentrations de polluants atmosphériques étaient plus élevées avant un changement ou un remplacement en raison de l’inefficacité du médicament. Les auteurs ont conclu que la pollution atmosphérique environnementale était un facteur déterminant de la mauvaise réponse au traitement biologique. Les interventions visant à réduire les émissions de combustion de combustibles fossiles pourraient avoir des effets bénéfiques sur le taux de persistance des traitements biologiques chez les personnes atteintes d’arthrite inflammatoire.

*Nguyen Y, et al. Association between passive smoking in childhood and adulthood, and rheumatoid arthritis: results from the French E3N-EPIC cohort study. Présenté à l’EULAR 2021; résumé OP0012.

**Un antigène est toute substance qui incite votre système immunitaire à produire des anticorps contre elle.

***Adami G, et al. Air pollution is a predictor of poor response to biological therapies in chronic inflammatory arthritides. Présenté à l’EULAR 2021; affiche POS0644.

Retard de diagnostic dans la spondylarthrite axiale

La spondylarthrite axiale est un type d’arthrite inflammatoire affectant le dos. Les recherches démontrent un retard moyen d’environ 7 ans - et jusqu’à 15 ans dans certains cas - pendant lequel la maladie peut progresser et entraîner des dommages irréversibles. Les données indiquent que les femmes attendent plus longtemps que les hommes pour obtenir un diagnostic et les progrès réalisés pour réduire le délai de diagnostic sont très limités. Ce délai a un impact extrêmement négatif sur la qualité de vie d’une personne. Comme la maladie se déclare souvent à un stade précoce, les personnes sont laissées sans traitement - ou avec des symptômes mal traités - à une période formatrice de leur vie.

Lors de l’assemblée annuelle de l’EULAR en 2021, le Dr Dale Webb et ses collègues de la Fédération internationale de spondylarthrite axiale (ASIF) ont présenté les résultats d’une analyse documentaire complète et de deux forums mondiaux virtuels, auxquels ont participé des patients et des représentants de groupes de patients, des chercheurs, des rhumatologues et d’autres professionnels de la santé*.

Les résultats de ces activités ont été incorporés dans un nouveau rapport intitulé « Retard dans le diagnostic » (Delay to Diagnosis), qui détaille les expériences vécues d’un point de vue mondial en matière de retard de diagnostic de la spondylarthrite axiale. Le rapport a identifié des problèmes communs à différents pays et systèmes de soins de santé contribuant au retard moyen actuel de 7 ans dans le diagnostic. Ces problèmes incluent les suivants :
  1. faible sensibilisation à la spondylarthrite axiale parmi les personnes présentant des symptômes;
  2. manque de reconnaissance de la maladie parmi la population en général;
  3. diagnostic erroné au premier point de contact avec le système de santé;
  4. voies de référence pour consultation mal définies;
  5. difficultés d’accès aux soins appropriés; et
  6. défis au sein de la rhumatologie elle-même.
*Webb D, et al. The Unacceptable Delay to Diagnosis in Axial Spondyloarthritis; Developing a Call to Action for a Global Healthcare Challenge. Présenté à l’EULAR 2021; résumé OP0275-PARE.

L’issue de la grossesse est affectée par la maladie arthritique inflammatoire de la mère et du père

Deux études présentées lors de l’assemblée annuelle de l’EULAR en 2021 démontrent que les femmes atteintes de polyarthrite rhumatoïde (PR) courent un risque accru d’issue défavorable de la grossesse, en particulier de naissance prématurée et de bébés de petite taille pour l’âge gestationnel; et, pour la première fois, démontrent que les compagnes d’hommes atteints d’arthrite inflammatoire ont un taux plus faible de naissances vivantes et sont plus susceptibles de faire une fausse couche.

Dans la première étude, des chercheurs suédois et danois ont examiné l’issue de la grossesse en fonction de l’activité de la maladie et des stratégies de traitement chez les femmes atteintes de PR*. Dans l’ensemble, les femmes atteintes de PR avaient une probabilité accrue d’avoir des bébés prématurés (PTB) et des bébés de petit âge gestationnel (SGA). Une forte activité de la maladie chez la mère pendant la grossesse a renforcé les associations avec la prématurité et l’insuffisance pondérale. En examinant les effets des différents traitements médicamenteux, les chercheurs ont constaté qu’un traitement associant des médicaments biologiques et des stéroïdes oraux et/ou des ARMMts** dans les neuf mois précédant la grossesse était associé à un risque accru de PTB et de SGA. Pendant la grossesse, l’activité de la maladie semble être le facteur de risque le plus important de PTB et de SGA chez les femmes atteintes de PR. Ces résultats soulignent l’importance de surveiller la PR pendant la grossesse, en particulier chez les femmes recevant un traitement intensif ou celles dont l’activité de la maladie se poursuit.

Dans une deuxième étude, les chercheurs ont examiné les partenaires enceintes d’hommes souffrant d’arthrite inflammatoire afin de déterminer la relation entre l’âge avancé du père, l’intégrité de l’ADN des spermatozoïdes et certains défauts génétiques avec de plus mauvais résultats de grossesse.***

Il s’agit de la plus grande étude décrivant les caractéristiques et les issues de grossesse des partenaires d’hommes atteints d’arthrite inflammatoire et la première à démontrer que la maladie paternelle est associée à un risque plus élevé de fausse couche. Toutefois, les chercheurs ont mis en garde contre le fait que le lien entre l’activité de la maladie, le type et le moment du traitement par des médicaments contre l’arthrite inflammatoire, et le risque de ces résultats n’est pas clair et doit être étudié plus avant.

*Hellgren K, et al. Pregnancy outcomes in relation to disease activity and anti-rheumatic treatment strategies in women with rheumatoid arthritis - a matched cohort study from Sweden and Denmark. Présenté à l’EULAR 2021; résumé OP0210.

**Conventional synthetic DMARDs include traditional medications such as methotrexate, sulfasalazine, leflunomide, hydroxychloroquine, gold, salts and others.

***Perez-Garcia LF, et al. Paternal inflammatory arthritis is associated with a higher risk of miscarriages: results of a large multicenter study (iFAME-Fertility). Présenté à l’EULAR 2021; résumé OP0211.

Diminution du risque de démence et d’insuffisance cardiaque chez les patients atteints de PR

Deux études menées par la clinique Mayo aux États-Unis démontrent une baisse substantielle du risque de démence et d’insuffisance cardiaque chez les personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde (PR) dans les années 2000 par rapport aux années 1980, ce qui coïncide avec l’introduction des médicaments biologiques pour la PR.

L’insuffisance cardiaque est l’une des affections cardiovasculaires les plus fréquentes chez les personnes atteintes de PR et des études antérieures ont suggéré que les personnes atteintes de PR sont deux fois plus susceptibles de développer une insuffisance cardiaque que les personnes de la population générale non atteintes de PR. En ce qui concerne la démence, les études antérieures ont fourni des résultats mitigés sur le schéma de déficience cognitive et de démence chez les personnes atteintes de PR par rapport à la population générale - certaines études montrant une probabilité accrue, tandis que d’autres montrent l’inverse. En outre, les études existantes n’ont pas évalué les tendances de l’incidence de la démence ou de l’insuffisance cardiaque pour voir si les risques ont changé au fil du temps.

Les chercheurs de la clinique Mayo ont mené des études de population pour évaluer l’incidence de la démence ou de l’insuffisance cardiaque au fil du temps chez les personnes atteintes de PR et les ont comparées à la population générale.* Globalement, le risque de démence chez les patients atteints de PR était significativement plus élevé que chez les personnes non atteintes de cette maladie. Lorsqu’on le subdivise par décennie, le risque de démence chez les personnes diagnostiquées avec la PR était plus élevé que chez les personnes non atteintes de PR dans les années 1980 et 1990 - mais non dans les années 2000.

Les chercheurs d’une deuxième étude de la clinique Mayo ont utilisé les mêmes méthodes pour examiner les tendances de l’insuffisance cardiaque chez 905 personnes chez qui la PR a été diagnostiquée entre 1980 et 2009.** Ces résultats démontrent qu’il n’y a pas eu de différence dans l’incidence de l’insuffisance cardiaque dans les années 1990 et 2000 par rapport aux années 1980. Si l’on compare le risque d’insuffisance cardiaque chez les personnes atteintes de PR et celles qui n’en sont pas atteintes, les personnes chez qui la PR a été diagnostiquée dans les années 2000 ne présentaient pas de risque excessif d’insuffisance cardiaque par rapport à la population générale.

Les chercheurs ont observé que d’autres études devraient examiner ces associations et se pencher sur le rôle de l’inflammation, de l’auto-immunité et des traitements de l’arthrite inflammatoire dans le risque de démence et d’insuffisance cardiaque.

*Kronzer V, et al. Trends in Occurrence of Dementia in Patients with Rheumatoid Arthritis: a Population-based Cohort Study, 1980-2009. Présenté à l’EULAR 2021; résumé OP0216.

**Myasoedova E, et al. Decline in Excess Risk of Heart Failure in Patients with Rheumatoid Arthritis in Recent Years. Présenté à l’EULAR 2021; résumé OP0102.